ELEGIES MOI, JE LE SAIS
à Mademoiselle Louise Crombach
vous le saurez ! La vie a des abîmes
cachés au loin sous d' innombrables fleurs ;
les rossignols qui chantent à leurs cimes,
où chantent-ils dans la saison des pleurs ?
Vous le saurez ! La vie a des abîmes
cachés au loin sous d' innombrables fleurs.
Oui, la jeunesse est le pays des larmes.
Moi, je le sais : j' en viens, je pleure encor,
le front vibrant de ses feux, de ses charmes,
le coeur brisé de son dernier accord !
Oui, la jeunesse est le pays des larmes.
Moi je le sais : j' en viens, je pleure encor !
Lorsqu' on finit d' être jeune, on s' arrête :
à tant de jours on veut reprendre un jour ;
ils sont partis, et l' on penche sa tête.
D' un tel voyage à quand donc le retour ?
Lorsqu' on finit d' être jeune, on s' arrête :
à tant de jours on veut reprendre un jour.
Souffrant tout bas de ses mille blessures,
on croit mourir : on plie, on ne meurt pas !
De tous serpents Dieu guérit les morsures,
et le dictame est semé sous nos pas.
Souffrant tout bas de ses mille blessures,
on croit mourir : on plie, on ne meurt pas !
Rappelez-vous ce chant d' une glaneuse
qui s' arrêta pour serrer votre main ;
et si du sort l' étoile lumineuse
vous mûrit mieux les épis du chemin,
rappelez-vous ce chant d' une glaneuse
qui s' arrêta pour serrer votre main.