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 Jean Auvray (ca. 1580-ca. 1630) L'amoureuse hydopisie

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Jean Auvray (ca. 1580-ca. 1630) L'amoureuse hydopisie Empty
MessageSujet: Jean Auvray (ca. 1580-ca. 1630) L'amoureuse hydopisie   Jean Auvray (ca. 1580-ca. 1630) L'amoureuse hydopisie Icon_minitimeLun 15 Aoû - 17:33

L'AMOUREUSE HYDROPISIE

Quel poëte facond, quelle muse gaillarde,
Ce doux mal chantera sans foy mesme enchanter?
Mercure n' eust jamais la voix assez mignarde.
Pour ce suject mignard mignardement chanter.
Mal qui au commencer est autant agreable,
Qu' en sa declinaison il semble douloureux,
Mais, comment sçauroit-on l' amour estre amiable
S' il ne mesloit du fiel en son miel savoureux?
Nous filles qui bruslons de flames amoureuses,
N' estimant en ce monde un plus doux paradis,
Helas! Que nous serions en aymant bien heureuses,
Si nos tetins n' enfloient leurs boulets arrondis.


Ce seroit un beau jeu si nostre flame prompte
Ne rencontroit de chance au choc de ce poison,
Mais l' excez du plaisir nostre crainte surmonte,
Et nos esprits pasmez y perdent la raison.
Nous benirons l' amour, ses charmes ses pointures,
Ses fléches, son carquois et ses traicts assassins,
S' il ne falloit jamais allonger nos ceintures
Ny descouvrir au jour nos amoureux larcins.
Si ce nectar germeux sans enfler nostre ventre,
Finissoit sa vertu en la fin du desir,
Ou bien s' il en sortoit aussi doux qu' il y entre,
Nous aurions peu de crainte et beaucoup de plaisir.
Ô levain trop fecond, ô dangereuse enfleure,
Que vous nous cher-vendez nos esbats amoureux,
Helas! Qui eust pensé que si douce piqueure
Eut trainé quand et soy tant d' effects douloureux!
Celle à qui un mary luy sert de couverture
Ne trouble comme nous son plaisir d' un ennuy,
Ains un sot à l' espreuve admire la peinture
D' un pourtraict façonné par le pinceau d' autruy.
Mais ce qui plus nous fasche est de voir que nos meres
Nous martellent de coups sans leur avoir forfaict,
Si ce n' est un forfaict que d' estre debonnaires,


L' ogeant l' aveugle ainsi qu' autrefois ils ont faict.
Meres pour un plaisir ne causez tant de troubles,
Si nous vous invitons pourquoy vous faschez vous?
Le conseil en est pris, le feu est aux estoupes,
Nous faisons comme vous, vous fistes comme nous.
Viença nous disent-ils (escumantes de rage)
Dy nous qui t' a vollé ta fresle chasteté?
Afin que le manteau d' un sacré mariage
Couvre le rapt honteux de ta pudicité.
Alors si nos amans legers et variables
Ne veulent accepter ce joug tant estimé,
Il faut que nous servions de joüets et de fables,
Au lubrique examen d' un notaire affamé.
Et bien la belle fille où fut-ce? En quelle place
Cét hydropique mal vous vint il rencontrer?
Le sentites vous point un peu plus chaud que glace?
Vous promit-il la foy avant que d' y entrer?
De semblables fatras ces aleges de bource
Drappent sur nostre honneur: mais, si sans nul espoir
L' enfant chasse le pere et qu' il prenne la course,
Nos maux sont en l' extresme et nous au desespoir.
Helas (disons nous lors) qu' indiscrettes nous sommes


De nous laisser surprendre aux rets de ces pipeurs,
Malheureux qui se fie aux promesses des hommes,
Qui n' ont rien plus constant qu' estre constant trompeurs.
Mais en vain nous semons ces plaintes et ces larmes
Ces imprecations ne nous guarissent point,
Il n' y à jus, racine, enchantemens n' y charmes,
Qui puissent alenter la douleur qui nous poinct.
Or si la fille est riche et de bon lieu sortie,
Bien devant que le terme on perçoive approcher,
Pelerine d' amour, en quelque metairie,
Comme un sainct de caresme il la convient cacher.
Où ayant achevé ce beau pelerinage,
Et son ventre alegé de son faix de neuf mois,
Il n' y paroit non plus qu' un nez en un visage,
Et son vice est remis pour la premiere fois.
Puis accroissant le prix d' un nopcier hymnée,
De son honneur perdu l' on sauve la moitié,
Car à quelque lourdaut pour femme elle est donnée,
Qui se void aussi tost cocu que marié.
Si tu trouves (amy) ta besongne parfaicte
Tu ne dois t' en fascher n' y courroucer si fort,
La ville se prend mieux lors que la bréche est faicte,
Le bourg demantelé resiste à moindre effort.


Mais, las! Si l' hydropique est pauvre et dizetteuse
Elle vend à vil prix si peu qu' elle à de bien,
Et puis chez la grand' barbe, ou chez la fourbisseuze
Implore le secours de l' oeil dictinien.
De ces patrons d' amour durant ceste gezine
Elle apprend mille tours, mille subtilitez,
Et tous les jeux mignards de la belle Ciprine
Pour vendre la moisson de ses lubricitez.
Courage, disent lors ces sangsuës gloutonnes,
Il ne faut qu' un bon coup pour payer tous ces frais,
Ne prodiguez donc plus vos jeunesses (mignonnes)
Joignez l' utilité au plaisir desormais.
Le temps fuit comme l' ombre, et ces vermeilles rozes
Qui peignent vostre face en fin se terniront,
Ces beaux oeillets declos sur vos lévres décloses
Sous l' acier du faucheur quelque jour passeront.
Vos beaux cheveux espars par ondes crespelées
Qu' un zephire mignard secouë mollement,
Un jour seront tout gris, et leurs tresses meslées
Crasseuses tomberont par faute d' aliment.
Le riban incarnat de vos lévres jumelles
Perdra son vermeillon perdant vostre prin-temps,
Et les tertres bessons de vos fermes mamelles


Molasses et flétris deviendront par le temps.
Les fredons decoupez de vos voix amiables
Comme chants de hibou seront mal gratieux,
Vos fronts seront ridez et vos yeux agreables
Deviendront enfonçez, haves et chassieux.
Lors si la pauvreté talonne vos vieillesses,
Vous maudirez le jour que vous avez ployé
Sous le joug amoureux vos aymables jeunesses,
En regrettant le temps qu' avez mal employé.
Ainsi du far-messin ces sirenes trompeuses
Ces esprits peu rusez enchantent tellement:
Qu' ils n' ont si tost perdu leurs grossesses honteuses
Qu' ils sont filles de bien comme au commencement.
La faveur qu' ils avoient à un seul departie,
Ils prodiguent à tous pour un prix lucratif,
Et ne retombent plus en leur hydropisie
Car le meslange esteint l' esprit generatif.
Filles, qu' un feu d' amour enflame la poictrine,
Pour crainte de ce mal ne laissez pas d' aymer,
Ne perdez à cueillir la roze pour l' espine,
Le plaisir pour la peine, et le doux pour l' amer.
Que si le doux nectar dont vous estes gouluës


Dilate quelquefois vostre ventre puceau,
Du sang de vostre sang vos mains ne soient polluës,
Et ne luy servez pas de biere et de berceau.
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Jean Auvray (ca. 1580-ca. 1630) L'amoureuse hydopisie
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