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 Victor HUGO (1802-1885) Et puis, songez-y 'donc, si l'on' allait conclure

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Victor HUGO (1802-1885) Et puis, songez-y 'donc, si l'on' allait conclure Empty
MessageSujet: Victor HUGO (1802-1885) Et puis, songez-y 'donc, si l'on' allait conclure   Victor HUGO (1802-1885) Et puis, songez-y 'donc, si l'on' allait conclure Icon_minitimeJeu 22 Déc - 20:47

Et puis, songez-y 'donc, si l'on' allait conclure
De tout cela, qu'il est parfois unefêlure
A la chose jugée, et qu'un tribunal peut
Se tromper, faire faire à la cordé un faux nœud,
Un faux 'coup à la hache, un' faux acte au concierge
De Thémis, un faux pas à' la loi;' cette vierge '
Qui n'a jusqu'à ce jour'guère eu d'autres époux
Que cinq ou six Bellarts et sept ou' huit Maupeoux!
Reste,, ô sombre innocent, dans ton opprobre inique.
Garde ce crime ainsi. que l'ardente tunique, .
Que devient la peau même et qu'on n''arrache pas 6S
Les juges monstrueux prennent leur faux compas
Et font autour. de toi ce cercle. épouvantable.
Au banquet de César la- Justice s'attable.;
Elle n'a . pas le temps d'être juste.. Il. te faut,
Comme Jésus sa croix, porter ton échafaud..
Reste sous ton ,fardeau, . patient! Sur ta! tombe,
Un remords qui' médite, une larme qui' tombe,
Tu n'as .pas même, hélas! ce lugubre bonheur.
Sois pour. toujours muré dans le noir déshonneur.
On t'.enferme éperdu dans le forfait d'un autre.
Va, ton crime n'est pas ton crime, , il est le nôtre!
Car, lorsqu'il râle et meurt, le 'fer des lois au. sein,
L'innocent a le monde entier pour. assassin.
'Quiconque a respiré pendant le meurtre, adhère,
Et quiconque boit, mange et dort, est solidaire;
Le ciel blâme et maudit le genre humain, passant
Sans voir que sur la foule immense il pleut du sang.
Le peuple qui, stupide, aux juges se confie,
Regardant le bourreau pendant qu'il crucifie,
Laissant enfoncer l'un après l'autre-les clous,
Est lâche, et les moutons sont complices des loups.
Le juge, à ce Lesurque où sa- rage s'attache,
Donne un coup de poignard aprè's un coup de hache;

De féroce il devient infâme; et nous l'aidons
Par notre indifférence et par nos abandons.
Il viole un cercueil. Sous ce fatal empire,
Le prêtre est assassin et le juge est vampire!
Et nous voyons, béants, ces hommes manier
L'innocence et la loi, la tête et le panier!

Ah! la goutte de sang, plus que la goutte d'huile,
S'élargit, et la Grève éclabousse la ville 69
L'échafaud, vu de tous, est un hideux sommet.
L'attentat qu'en plein jour, nous présents, l'on commet,
Est l'égout collecteur de nos lâchetés sombres.
Du droit humain brisé nous sommes les décombres;
Nul n'est de la souillure universelle exempt;
Le grand forfait public est én nous frémissant;
Jamais l'innocent mort, qui nous trouble et nous pèse,
Dans notre conscience obscure ne s'apaise.
Deuil profond!

Protestons du moins. Si je flétris
Ces juges, par mon vers dans leur honte pétris,
Si j'ai cette huée implacable à la bouche,
Si j'ai redit vingt fois cette plainte farouche,
Peuple, c'est que ma part de crime m'étouffait.
Peuple, avoir laissé faire, hélas, c'est avoir fait!
Garde toute l'horreur de ta lugubre histoire,
Lesurques! dresse-toi, grande figure noire!
Qu'on te voie à jamais debout sur l'horizon.
Et vous, famille à qui l'on vola sa maison,
Martyrs dont la stupeur s'est changée en folie,
Veuves qu'on déshonore, orphelins qu'on spolie,
Désormais plus de plainte, et taisez-vous, proscrits.
Ah! je frémis de voir leurs prières, leurs cris,
Leurs larmes, leurs appels craintifs, leurs plaidoiries,
Leurs tremblantes douleurs par le dédain meurtries,
Leurs fronts baissés, leurs bras suppliants, quand c'est nous,
Nous tous, qui devrions nous traîner à genoux,
Joindre les mains, pleurer notre erreur insondable,
Peuple, et demander grâce au spectre formidable!

2 décembre.
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