LIVRE 3 ELEGIE 23
C' est assez d' une faible lyre
tirer de timides accords ;
c' est assez du dieu qui m' inspire
dans de frivoles jeux dissiper les trésors.
Rentrez sous vos rians ombrages,
doux enfans de la paix, voluptueux amours ;
cachez-vous. La discorde a troublé nos rivages ;
le soldat jusqu' aux cieux pousse des cris sauvages,
et j' entends battre les tambours.
Quel demi-dieu, chéri des filles de mémoire,
arraché tout sanglant aux assauts meurtriers,
s' avance au bruit pompeux des instrumens guerriers ?
C' est Achille ou d' Estaing, qui, courbé sous sa
gloire,
descend à pas tardifs de son char de victoire,
et pare un jeune roi de ses doubles lauriers.
Levons-nous, il est temps : qu' on apporte mes armes ;
d' un large bouclier chargez mon faible bras.
Oui, j' abjure, ô Vénus ! Tes honteuses alarmes ;
amour, perfide amour, je renonce à tes charmes.
C' en est fait : l' honneur parle, et je vole aux
combats.