A Clotilde
29 juillet 1906
Ô vous pour qui je viens à cette heure pleurer
Dans le calme profond de la belle Nature
Sur votre lèvre hélas surprendrais-je un murmure
Qui dise à mon amour que vous savez aimer
Je suis seul à l'instant où vous riez peut-être
Loin de ces plaisirs fous qui plaisent à nos coeurs
A la sombre forêt confiant mes douleurs
J'admire les vallons à l'abri d'un vieux hêtre
Je pense et je suis triste au seuil de la forêt
En songeant à ce jour où la gaieté suprême
Semblait de son baiser me confondre moi-même
Et pour toute une vie éloigner mon regret
Je vois la foule heureuse en ce lieu solitaire
A l'abri des grands bois jouir d'un doux repos
Les enfants s'amuser sans souci du chaos
Qui fait trembler nos coeurs d'une injuste colère
Prenant l'étroit chemin deux jeunes fiancés
S'en vont insouciants adorer leur chimère
Et d'un pas cadencé longeant le cimetière
Ils vont vivre l'amour dans le feu des baisers
Fallait-il ce tableau pour grandir ma souffrance
Ô non mon désespoir était assez obscur
Mais peut-être pour moi dans un bonheur futur
L'amour a-t-il caché ma juste récompense
Vivrons-nous le bonheur que vous m'avez promis
Dans le feu pénétrant d'une chère caresse
Ô venez vous que j'aime adoucir ma tristesse
Et soutenir encor mes projets affaiblis
Oui c'est vrai vous m'aimez. Ce n'était pas un rêve
L'instant où votre lèvre a sû me consoler
L'instant où votre coeur à mon coeur sût parler
Les choses de l'amour qui méconnaît la trêve
Exaucez ma prière et faites que mes voeux
Ne soient pas emportés au hasard de la vie
Soutenez dans mon coeur l'espérance affaiblie
J'ai trouvé le bonheur dans l'azur de vos yeux.
Honoré HARMAND