Qu'êtes-vous devenues ?
5 mars 1946
L'oubli sur mes amours frivoles
A jeté son voile léger ;
Mais vous deux, mes chères idoles,
Qui, mon coeur sûtes partager,
Dîtes ! Qu'êtes-vous devenues ?
Dans le rapide flot humain ;
A jamais pour moi disparues.
Quel doit être votre destin ?
Berthe, à la voix si caressante,
Te souviens-t-il de nos serments ?
Se peut-il qu'à ce point l'on mente ?
Existe-t-il de faux amants ?
Toujours présente en ma mémoire
Est la scène du grand frisson ;
Lorsque ta chevelure noire
Cachait tes seins en pamoison.
Dans ma pesante solitude
Il me semble entendre ta voix
Et j'écoute le cher prélude
De mon vrai bonheur d'autrefois.
Et toi Jeanne, « Petite chose » ?
Témoin de mon profond chagrin
Qui me tendis ta lèvre rose
Où je pris un baiser divin.
Toi, qui méprisant l'anathème,
Risquas de perdre ton bonheur ;
Qui m'inspiras tant de poèmes
Essence pure de mon coeur ?
A l'heure de la rêverie
Te souviens-t-il des jours passés
Où dans une même folie
L'amour nous tenait enlacés ?
Mais pourquoi vous crier ma peine ?
La Constance a su me punir
Et, seul, en silence j'égrène
Le chapelet du souvenir.
Je suis seul ! Le vilain mensonge !
Car notre amour fut surhumain.
Je vous adore, dans un songe
Qui, pour moi, n'aura pas de fin !
Honoré HARMAND