Vision macabre
1er août 1948
Un soir du suave mois d'août,
L'un de ces soirs où l'air est doux
La Mort près de moi s'est assise.
Ensemble nous avons causé :
Un autre n'aurait pas osé
Affronter son image grise.
Je lui fis place sur le banc
Où je m'assieds en me grisant
De l'enivrante odeur des roses
A l'heure où s'éveille la nuit,
Où le Silence nous conduit
Au temple des métamorphoses.
Pourquoi te rapprocher de moi ?
Je ne comprends pas le pourquoi
De ton inlassable insistance.
Je suis pauvre et je vis heureux.
Poursuis les êtres désireux
D'en finir avec l'existence.
Méprisant la gloire et l'argent
Je vis ma vie en partageant,
Avec mes enfants, ma tendresse.
Leur amitié n'a pas de prix.
Par leur amour mon coeur est pris
Et c'est la plus belle richesse.
La Mort réfléchit un instant
Puis disparut en marmottant
Un blasphème entre sa mâchoire.
Elle fuyait, faux sur le dos
Et j'entendis craquer ses os
Sous le poids de sa cape noire.
Honoré HARMAND