Les ombres
26 janvier 1906
Dans les profondeurs de la nuit
Deux ombres se glissaient sans bruit
Sous les grands arbres effeuillés
On eût dit les frissons du rêve
Où le soupir de l'heure brève
Aux ineffables voluptés
Près de moi je les vis passer
Puis disparaître et s'effacer
Comme de douces visions
Ainsi disparaît notre ivresse
Quand nous recevons la caresse
Des noires désillusions
Un mois après tard dans la nuit
Une ombre se glissait sans bruit
Sous les grands arbres effeuillés
En dépit de l'heure suprême
Une amante à la face blême
Pleurait ses chères voluptés
Près de moi je la vis passer
Puis disparaître et s'effacer
Comme une voile loin du port
Ainsi disparaît l'espérance
Quand on a franchi la distance
Qui nous sépare de la mort
Honoré HARMAND