PLUME DE POÉSIES
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 Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit

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MessageSujet: Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit   Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit Icon_minitimeJeu 4 Avr - 10:07

II. Une ronde de nuit

Dix minutes après, la petite troupe sortait par la rue des Bons-
Enfants, derrière la salle de spectacle qu’avait bâtie le cardinal
de Richelieu pour y faire jouer _Mirame_, et dans laquelle le
cardinal Mazarin, plus amateur de musique que de littérature,
venait de faire jouer les premiers opéras qui aient été
représentés en France.

L’aspect de la ville présentait tous les caractères d’une grande
agitation; des groupes nombreux parcouraient les rues, et, quoi
qu’en ait dit d’Artagnan, s’arrêtaient pour voir passer les
militaires avec un air de raillerie menaçante qui indiquait que
les bourgeois avaient momentanément déposé leur mansuétude
ordinaire pour des intentions plus belliqueuses. De temps en temps
des rumeurs venaient du quartier des Halles. Des coups de fusil
pétillaient du côté de la rue Saint-Denis, et parfois tout à coup,
sans que l’on sût pourquoi, quelque cloche se mettait à sonner,
ébranlée par le caprice populaire.
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MessageSujet: Re: Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit   Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit Icon_minitimeJeu 4 Avr - 10:07

D’Artagnan suivait son chemin avec l’insouciance d’un homme sur
lequel de pareilles niaiseries n’ont aucune influence. Quand un
groupe tenait le milieu de la rue, il poussait son cheval sans lui
dire gare, et comme si, rebelles ou non, ceux qui le composaient
avaient su à quel homme ils avaient affaire, ils s’ouvraient et
laissaient passer la patrouille. Le cardinal enviait ce calme,
qu’il attribuait à l’habitude du danger; mais il n’en prenait pas
moins pour l’officier, sous les ordres duquel il s’était
momentanément placé, cette sorte de considération que la prudence
elle-même accorde à l’insoucieux courage.

En approchant du poste de la barrière des Sergents, la sentinelle
cria: «Qui vive?» D’Artagnan répondit, et, ayant demandé les mots
de passe au cardinal, s’avança à l’ordre; les mots de passe
étaient _Louis_ et _Rocroy_.

Ces signes de reconnaissance échangés, d’Artagnan demanda si ce
n’était pas M. de Comminges qui commandait le poste.

La sentinelle lui montra alors un officier qui causait, à pied, la
main appuyée sur le cou du cheval de son interlocuteur. C’était
celui que demandait d’Artagnan.
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MessageSujet: Re: Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit   Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit Icon_minitimeJeu 4 Avr - 10:07

- Voici M. de Comminges, dit d’Artagnan revenant au cardinal.

Le cardinal poussa son cheval vers eux, tandis que d’Artagnan se
reculait par discrétion; cependant, à la manière dont l’officier à
pied et l’officier à cheval ôtèrent leurs chapeaux, il vit qu’ils
avaient reconnu son Éminence.

- Bravo, Guitaut, dit le cardinal au cavalier, je vois que malgré
vos soixante-quatre ans vous êtes toujours le même, alerte et
dévoué. Que dites-vous à ce jeune homme?

- Monseigneur, répondit Guitaut, je lui disais que nous vivions à
une singulière époque, et que la journée d’aujourd’hui ressemblait
fort à l’une de ces journées de la Ligue dont j’ai tant entendu
parler dans mon jeune temps. Savez-vous qu’il n’était question de
rien moins, dans les rues Saint-Denis et Saint-Martin, que de
faire des barricades.

- Et que vous répondait Comminges, mon cher Guitaut?

- Monseigneur, dit Comminges, je répondais que, pour faire une
Ligue, il ne leur manquait qu’une chose qui me paraissait assez
essentielle, c’était un duc de Guise; d’ailleurs, on ne fait pas
deux fois la même chose.

- Non, mais ils feront une Fronde, comme ils disent, reprit
Guitaut.

- Qu’est-ce que cela, une Fronde? demanda Mazarin.

- Monseigneur, c’est le nom qu’ils donnent à leur parti.

- Et d’où vient ce nom?
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MessageSujet: Re: Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit   Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit Icon_minitimeJeu 4 Avr - 10:07

- Il paraît qu’il y a quelques jours le conseiller Bachaumont a
dit au Palais que tous les faiseurs d’émeutes ressemblaient aux
écoliers qui frondent dans les fossés de Paris et qui se
dispersent quand ils aperçoivent le lieutenant civil, pour se
réunir de nouveau lorsqu’il est passé. Alors ils ont ramassé le
mot au bond, comme ont fait les gueux à Bruxelles, ils se sont
appelés frondeurs. Aujourd’hui et hier, tout était à la Fronde,
les pains, les chapeaux, les gants, les manchons, les éventails;
et, tenez, écoutez.

En ce moment en effet une fenêtre s’ouvrit; un homme se mit à
cette fenêtre et commença de chanter:

_Un vent de Fronde_
_S’est levé ce matin;_
_Je crois qu’il gronde_
_Contre le Mazarin._
_Un vent de Fronde_
_S’est levé ce matin!_

- L’insolent! murmura Guitaut.
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MessageSujet: Re: Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit   Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit Icon_minitimeJeu 4 Avr - 10:08

- Monseigneur, dit Comminges, que sa blessure avait mis de
mauvaise humeur et qui ne demandait qu’à prendre une revanche et à
rendre plaie pour bosse, voulez-vous que j’envoie à ce drôle-là
une balle pour lui apprendre à ne pas chanter si faux une autre
fois?

Et il mit la main aux fontes du cheval de son oncle.

- Non pas, non pas! s’écria Mazarin. _Diavolo_! mon cher ami,
vous allez tout gâter; les choses vont à merveille, au contraire!
Je connais vos Français comme si je les avais faits depuis le
premier jusqu’au dernier: ils chantent, ils payeront. Pendant la
Ligue, dont parlait Guitaut tout à l’heure, on ne chantait que la
messe, aussi tout allait fort mal. Viens, Guitaut, viens, et
allons voir si l’on fait aussi bonne garde aux Quinze-Vingts qu’à
la barrière des Sergents.

Et, saluant Comminges de la main, il rejoignit d’Artagnan, qui
reprit la tête de sa petite troupe suivi immédiatement par Guitaut
et le cardinal, lesquels étaient suivis à leur tour du reste de
l’escorte.

- C’est juste, murmura Comminges en le regardant s’éloigner,
j’oubliais que, pourvu qu’on paye, c’est tout ce qu’il lui faut, à
lui.
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MessageSujet: Re: Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit   Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit Icon_minitimeJeu 4 Avr - 10:08

On reprit la rue Saint-Honoré en déplaçant toujours des groupes;
dans ces groupes, on ne parlait que des édits du jour; on
plaignait le jeune roi qui ruinait ainsi son peuple sans le
savoir; on jetait toute la faute sur Mazarin; on parlait de
s’adresser au duc d’Orléans et à M. le Prince; on exaltait
Blancmesnil et Broussel.

D’Artagnan passait au milieu de ces groupes, insoucieux comme si
lui et son cheval eussent été de fer; Mazarin et Guitaut causaient
tout bas; les mousquetaires, qui avaient fini par reconnaître le
cardinal, suivaient en silence.

On arriva à la rue Saint-Thomas-du-Louvre, où était le poste des
Quinze-Vingts; Guitaut appela un officier subalterne, qui vint
rendre compte.

- Eh bien! demanda Guitaut.

- Ah! mon capitaine, dit l’officier, tout va bien de ce côté, si
ce n’est, je crois, qu’il se passe quelque chose dans cet hôtel.

Et il montrait de la main un magnifique hôtel situé juste sur
l’emplacement où fut depuis le Vaudeville.

- Dans cet hôtel, dit Guitaut, mais c’est l’hôtel de Rambouillet.
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MessageSujet: Re: Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit   Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit Icon_minitimeJeu 4 Avr - 10:08

- Je ne sais pas si c’est l’hôtel de Rambouillet, reprit
l’officier, mais ce que je sais, c’est que j’y ai vu entrer force
gens de mauvaise mine.

- Bah! dit Guitaut en éclatant de rire, ce sont des poètes.

- Eh bien, Guitaut! dit Mazarin, veux-tu bien ne pas parler avec
une pareille irrévérence de ces messieurs! tu ne sais pas que j’ai
été poète aussi dans ma jeunesse et que je faisais des vers dans
le genre de ceux de M. de Benserade.

- Vous, Monseigneur?

- Oui, moi. Veux-tu que je t’en dise?

- Cela m’est égal, Monseigneur! Je n’entends pas l’italien.

- Oui, mais tu entends le français, n’est-ce pas, mon bon et
brave Guitaut, reprit Mazarin en lui posant amicalement la main
sur l’épaule, et, quelque ordre qu’on te donne dans cette langue,
tu l’exécuteras?

- Sans doute, Monseigneur, comme je l’ai déjà fait, pourvu qu’il
me vienne de la reine.

- Ah oui! dit Mazarin en se pinçant les lèvres, je sais que tu
lui es entièrement dévoué.

- Je suis capitaine de ses gardes depuis plus de vingt ans.

- En route, monsieur d’Artagnan, reprit le cardinal, tout va bien
de ce côté.

D’Artagnan reprit la tête de la colonne sans souffler un mot et
avec cette obéissance passive qui fait le caractère du vieux
soldat.

Il s’achemina vers la butte Saint-Roch, où était le troisième
poste, en passant par la rue Richelieu et la rue Villedo. C’était
le plus isolé, car il touchait presque aux remparts, et la ville
était peu peuplée de ce côté-là.

- Qui commande ce poste? demanda le cardinal.
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MessageSujet: Re: Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit   Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit Icon_minitimeJeu 4 Avr - 10:08

- Villequier, répondit Guitaut.

- Diable! fit Mazarin, parlez-lui seul, vous savez que nous
sommes en brouille depuis que vous avez eu la charge d’arrêter
M. le duc de Beaufort; il prétendait que c’était à lui, comme
capitaine des gardes du roi, que revenait cet honneur.

- Je le sais bien, et je lui ai dit cent fois qu’il avait tort,
le roi ne pouvait lui donner cet ordre, puisqu’à cette époque-là
le roi avait à peine quatre ans.

- Oui, mais je pouvais le lui donner, moi, Guitaut, et j’ai
préféré que ce fût vous.

Guitaut, sans répondre, poussa son cheval en avant, et s’étant
fait reconnaître à la sentinelle, fit appeler M. de Villequier.

Celui-ci sortit.

- Ah! c’est vous, Guitaut! dit-il de ce ton de mauvaise humeur
qui lui était habituel, que diable venez-vous faire ici?

- Je viens vous demander s’il y a quelque chose de nouveau de ce
côté.

- Que voulez-vous qu’il y ait? On crie: «Vive le roi!» et «À bas
le Mazarin!» ce n’est pas du nouveau, cela; il y a déjà quelque
temps que nous sommes habitués à ces cris-là.

- Et vous faites chorus? répondit en riant Guitaut.

- Ma foi, j’en ai quelquefois grande envie! je trouve qu’ils ont
bien raison, Guitaut; je donnerais volontiers cinq ans de ma paye,
qu’on ne me paye pas, pour que le roi eût cinq ans de plus.

- Vraiment, et qu’arriverait-il si le roi avait cinq ans de plus?
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MessageSujet: Re: Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit   Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit Icon_minitimeJeu 4 Avr - 10:08

- Il arriverait qu’à l’instant où le roi serait majeur, le roi
donnerait ses ordres lui-même, et qu’il y a plus de plaisir à
obéir au petit-fils de Henri IV qu’au fils de Pietro Mazarini.
Pour le roi, mort-diable! je me ferais tuer avec plaisir; mais si
j’étais tué pour le Mazarin, comme votre neveu a manqué de l’être
aujourd’hui, il n’y a point de paradis, si bien placé que j’y
fusse, qui m’en consolât jamais.

- Bien, bien, monsieur de Villequier, dit Mazarin. Soyez
tranquille, je rendrai compte de votre dévouement au roi.

Puis se retournant vers l’escorte:

- Allons, messieurs, continua-t-il, tout va bien, rentrons.

- Tiens, dit Villequier, le Mazarin était là! Tant mieux; il y
avait longtemps que j’avais envie de lui dire en face ce que j’en
pensais; vous m’en avez fourni l’occasion, Guitaut; et quoique
votre intention ne soit peut-être pas des meilleures pour moi, je
vous remercie.

Et tournant sur ses talons, il rentra au corps de garde en
sifflant un air de Fronde.
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MessageSujet: Re: Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit   Alexandre Dumas.(Père)(1802-1870) II. Une ronde de nuit Icon_minitimeJeu 4 Avr - 10:09

Cependant Mazarin revenait tout pensif; ce qu’il avait
successivement entendu de Comminges, de Guitaut et de Villequier
le confirmait dans cette pensée qu’en cas d’événements graves, il
n’aurait personne pour lui que la reine, et encore la reine avait
si souvent abandonné ses amis que son appui paraissait parfois au
ministre, malgré les précautions qu’il avait prises, bien
incertain et bien précaire.

Pendant tout le temps que cette course nocturne avait duré, c’est-
à-dire pendant une heure à peu près, le cardinal avait, tout en
étudiant tour à tour Comminges, Guitaut et Villequier, examiné un
homme. Cet homme, qui était resté impassible devant la menace
populaire, et dont la figure n’avait pas plus sourcillé aux
plaisanteries qu’avait faites Mazarin qu’à celles dont il avait
été l’objet, cet homme lui semblait un être à part et trempé pour
des événements dans le genre de ceux dans lesquels on se trouvait,
surtout de ceux dans lesquels on allait se trouver.

D’ailleurs ce nom de d’Artagnan ne lui était pas tout à fait
inconnu, et quoique lui, Mazarin, ne fût venu en France que vers
1634 ou 1635, c’est-à-dire sept ou huit ans après les événements
que nous avons racontés dans une précédente histoire, il semblait
au cardinal qu’il avait entendu prononcer ce nom comme celui d’un
homme qui, dans une circonstance qui n’était plus présente à son
esprit, s’était fait remarquer comme un modèle de courage,
d’adresse et de dévouement.
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