Éliante, un peu fatiguée, vient d’entr’ouvrir son bel
oeil légèrement battu, et un faible sourire, qui dégénère
en un demi-bâillement, voltige sur sa petite bouche en
coeur que l’on prendrait pour une rose pompon. Elle
pense aux coq-à-l’âne de l’abbé et aux impertinences du
chevalier, au nez de plus en plus rouge de la pauvre
présidente ; mais ces souvenirs agréables s’effacent
bientôt et se confondent dans une pensée unique.
Car, il faut bien se l’avouer, si coquet et si galant
qu’ait été M. l’abbé, si turlupin que se soit montré M. le
chevalier, le succès de la soirée n’a pas été pour eux.
Un autre personnage, qui n’a rien dit et que l’on a
trouvé plus spirituel qu’eux, qui ne s’était pas mis en
frais de toilette et qu’on a déclaré le suprême de la
grâce et de l’élégance, a réuni tous les suffrages de
l’assemblée ; l’abbé lui-même, quoiqu’il en fût jaloux, a
été forcé de reconnaître ce mérite hors du commun et de
saluer l’astre naissant.
Ce personnage, dont toutes les dames raffolaient et
qui occupe en ce moment la pensée d’Éliante, pour ne
pas vous faire consumer en recherches et en conjectures
inutiles un temps que vous pourriez employer beaucoup
mieux, n’est autre chose que le petit chien de la
marquise, un bichon incomparable qu’elle avait apporté
dans son manchon ouaté.