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 Victor HUGO (1802-1885) Je m'en irai dans les chars sombres

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Victor HUGO (1802-1885) Je m'en irai dans les chars sombres  Empty
MessageSujet: Victor HUGO (1802-1885) Je m'en irai dans les chars sombres    Victor HUGO (1802-1885) Je m'en irai dans les chars sombres  Icon_minitimeJeu 22 Sep - 18:58

Je m'en irai dans les chars sombres
Du songe et de la vision;
Dans la blême cité des ombres
Je passerai comme un rayon;
J'entendrai leurs vagues huées;
Je semblerai dans les nuées
Le grand échevelé de l'air;
J'aurai sous mes pieds le vertige,
Et dans les yeux plus de prodige
Que le météore et l'éclair.


Je rentrerai dans ma demeure,
Dans le noir monde illimité.
Jetant à l'éternité l'heure
Et la terre à l'immensité,
Repoussant du pied nos misères,
Je prendrai le vrai dans mes serres
Et je me transfigurerai,
Et l'on ne verra plus qu'à peine
Un reste de lueur humaine
Trembler sous mon sourcil sacré.


Car je ne serai plus un homme;
Je serai l'esprit ébloui
À qui le sépulcre se nomme,
À qui l'énigme répond: Oui.
L'ombre aura beau se faire horrible;
Je m'épanouirai terrible,
Comme Élie à Gethsémani,
Comme le vieux Thalès de Grèce,
Dans la formidable allégresse
De l'abîme et de l'infini.


Je questionnerai le gouffre
Sur le secret universel,
Et le volcan, l'urne de soufre,
Et l'océan, l'urne de sel;
Tout ce que les profondeurs savent,
Tout ce que les tourmentes lavent,
Je sonderai tout; et j'irai
Jusqu'à ce que, dans les ténèbres,
Je heurte mes ailes funèbres
À quelqu'un de démesuré.


Parfois m'envolant jusqu'au faîte,
Parfois tombant de tout mon poids,
J'entendrai crier sur ma tête
Tous les cris de l'ombre à la fois,
Tous les noirs oiseaux de l'abîme,
L'orage, la foudre sublime,
L'âpre aquilon séditieux,
Tous les effrois qui, pêle-mêle,
Tourbillonnent, battant de l'aile,
Dans le précipice des cieux.


La Nuit pâle, immense fantôme
Dans l'espace insondable épars,
Du haut du redoutable dôme,
Se penchera de toutes parts;
Je la verrai lugubre et vaine,
Telle que la vit Antisthène
Qui demandait aux vents: Pourquoi ?
Telle que la vit Épicure,
Avec des plis de robe obscure
Flottant dans l'ombre autour de moi.


—Homme! la démence t'emporte,
Dira le nuage irrité.
—Prends-tu la nuit pour une porte ?
Murmurera l'obscurité.
L'espace dira:—Qui t'égare ?
Passeras-tu, barde, où Pindare
Et David ne sont point passés ?
—C'est ici, criera la tempête,
Qu'Hésiode a dit: Je m'arrête!
Qu'Ézéchiel a dit: Assez !


Mais tous les efforts des ténèbres
Sur mon essor s'épuiseront
Sans faire fléchir mes vertèbres
Et sans faire pâlir mon front;
Au sphinx, au prodige, au problème,
J'apparaîtrai, monstre moi-même,
Être pour deux destins construit,
Ayant, dans la céleste sphère,
Trop de l'homme pour la lumière,
Et trop de l'ange pour la nuit.
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Victor HUGO (1802-1885) Je m'en irai dans les chars sombres
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