A ma fille
A l'occasion de la première communion d'Yvette
Le 27 mai 1923
Ma fille en ce grand jour, le plus beau de ta vie
Pour nous, sans le savoir, tu ranimes l'envie
D'un bonheur trépassé.
Mais nous en revivons la sublime féerie
En te voyant marcher sur la route fleurie
Où nous avons passé.
Dans ton coeur abrité sous les ailes d'un ange
Aujourd'hui Dieu versa le parfum sans mélange
Dont il a le secret.
Ce parfum c'est la foi, le sentiment suprême
Qui met un cercle d'or autour du front qu'on aime
Comme autour d'un portrait.
Lys vivant je t'admire en ta robe si blanche
On dirait le lilas que suspend à ses branches
Le Printemps généreux.
Quand Avril échancrant son manteau de verdure
Nous invite à chanter comme dans la ramure
Chante l'oiseau joyeux.
Tu me pardonneras qu'un instant je t'attriste.
Hélas ! Des noms chéris sont absents sur la liste
De nos chers invités.
Que dans notre pensée ils aient encor leur place
Et, par le souvenir, sous leur linceul de glace
Ils soient ressuscités.
Mais chasse de tes yeux les brumes passagères
Qui viennent, chère enfant, d'effleurer tes paupières
La joie est à ce prix.
Le Plaisir nous transmet les leçons d'Epicure.
L'homme, pour vivre heureux, de gaîté franche et pure
Doit toujours être épris.
Au livre de ta vie il manquait une page
Je l'ajoute et j'écris les doctrines du sage
Et quand tu grandiras
En te remémorant ces choses si lointaines
Si fatigant que soit le fardeau de tes peines
Tu le supporteras.
Honoré HARMAND