Impressions
Au poète Philéas LEBESGUE
De La Neuville-Vault
20 août 1925
Je n'ai fait que passer, un jour, dans le village
Que vous avez choisi, pour vivre sans tapage
Parmi des familiers.
Loin du monde et du bruit de la ville infernale
Où l'esprit cahoté se perd dans le dédale
Des devoirs journaliers ;
Accusez Apollon ; il m'a servi de guide
Pour vous connaître mieux et, dans l'école vide
A dirigé mes pas.
C'est là que j'ai trouvé, parmi d'autres brochures
L'ouvrage où votre coeur a décrit ses blessures :
Celles qu'on ne voit pas.
Vos vers sont imprégnés d'un parfum de verveine
Dont a dû se griser votre muse sereine
En dansant dans les prés.
Et, par les longs chemins tracés dans la verdure
Je vous ai devinés, errant à l'aventure
Comme des émigrés.
Du gros recueil, hélas ! Je n'ai lu qu'une page ;
Mais cela m'a suffi pour écrire l'hommage
Qu'elle a su m'inspirer.
Et cet air pur et sain où vous vous sentez vivre
Le hasard a permis qu'en ouvrant votre livre
Je vins le respirer.
Quand je repasserai dans votre gai village
Permettez que j'arrête au seuil de l'ermitage
Fréquenté par les dieux.
Je verrai de plus près les troublantes chimères
Cacher vos yeux lassés de beautés éphémères
Sous un bandeau soyeux.
Honoré HARMAND