Misère sentimentale
6 juillet 1936
Misère étreins-moi dans tes bras
Nous sommes vieilles connaissances
Et nous avons des confidences
A nous faire -- en parlant tout bas.
Tu te souviens de ma jeunesse ;
Combien je vécus malheureux,
Comme vivent les amoureux
Au lendemain de leur ivresse.
Je m'étais trop imaginé
Que le bonheur était durable.
Je croyais trop à l'ineffable :
Cette grande foi m'a ruiné.
Je suis pauvre et n'ai plus personne
A qui je puis tendre la main.
Je suis seul sur le grand chemin
Où mon pas lourd, en vain résonne.
Je vais, étrange vagabond
Comme un chemineau sans asile
Tel un vert-galant sans idylle
Auquel aucun coeur ne répond.
Misère qu'importe, quand même,
Ma soeur, toi, tu me comprendras
Bien fort étreins-moi dans tes bras :
Si tu savais combien je t'aime.
Honoré HARMAND