Au feu les pompiers
Septembre 1936
A propos des nouveaux avertisseurs d'incendie
Au feu les pompiers c'est le dernier cri
Aussi c'est pourquoi simplement j'écris
Pour tous mes amis cette simple histoire :
Partout dans la ville on vient d'installer
Des avertisseurs. Plus besoin d'aller
Déranger tout le monde mêm'quand c'est la foire.
La jeune amoureuse, ayant du chagrin
En Octobre ira au son du crin-crin
A cet appareil conter sa misère
En brisant la glace, exprime en deux mots
Au pompier d'servic'l'objet de ses maux
Et en un clin d'oeil s'éteint sa chimère.
L'homme, qui souvent, tente à s'attarder
Encaisse un reproche, et ça va barder
Mécontent des coups qu'on lui administre
Ma femme, dit-il, n'a plus sa raison
Et le torchon brûle à notre maison
Arrêtez bien vite un si grand sinistre.
Le pochard lui-même appelle au secours
A l'avertisseur veut avoir recours
Mais on comprend mal, sa langue pâteuse
Il dit bafouillant : J'ai mal aux cheveux
« Pompier de malheur » combien je t'en veux
L'ivresse est ingrate et c'est une gueuse.
C'est beau le progrès ; nous vivons heureux
Mais souvent des gens prendront pour des jeux
Ces beaux appareils « nec ultra moderne »
Et si l'étourdi joue avec le feu
Il saura comprendre et j'en fais l'aveu
Ce qu'est la vessie auprès d'la lanterne.
Alors citoyenne pour les vrais malheurs
Brisez les carreaux des avertisseurs
Des braves pompiers ménagez l'courage
Ainsi vous serez à l'abri, toujours
Et, à peu près sûrs de finir vos jours
Sans craindre le feu dans votre ermitage.
Honoré HARMAND