Un dimanche, tout seul
A Léone et René, après le jour de l'an
16 janvier 1949
La nuit languissante s'achève.
Timidement le jour se lève
En s'étirant sous un ciel gris.
Quelle sera cette journée ?
Sera-t-elle bien terminée
Lorsque le soir m'aura surpris ?
Sortir, souvent je le redoute ;
Mais il me faut prendre la route
Pour trouver le lait et le pain.
En auscultant ma blague vide
Je suis pris d'un désir stupide :
En prendre aujourd'hui pour demain.
Du laitier je frappe à la porte
Car j'ai su que sa mère est morte
Et de vivre, j'ai le savoir.
C'était une brave personne.
Rien ne m'émeut ni ne m'étonne ;
Il me fut permis de la voir.
Rencontrant un ami sincère,
Il en est si peu sur la terre,
Le contraire m'eut étonné ;
Nous fûmes tous deux prendre un verre
Lénitif du vieux solitaire,
D'avance toujours pardonné.
Du repas retardant l'horaire
Je mis, afin de me distraire,
Mon poste en marche, sans façon.
Si je n'ai dans mon assiette
L'appétissante côtelette
Je me grise d'une chanson.
Je me remémore et je pense
Au dimanche où votre présence
Semait la joie en ma maison :
La Tristesse en vain me défie ;
Car je trouve belle la vie
Et vous êtes la raison.
Honoré HARMAND