La Pâquerette
31 août 1905
Loin du bruit, vivant ignorée
Je suis la fleur, chère aux amants
Et que cueille la bien aimée
Dans les jours heureux du printemps
(Texte supprimé
Mes pétales couleur d'hermine
Faible ornement de la nature
Sur le flanc de la colline
Etalent leur blanche parure)
Ma tige fragile et légère
Se balance au souffle du vent
Comme se berce une chimère
Dans les rêves d'un jeune enfant
Mon nom aisément se devine
Je vis modeste dans les champs
Mes pétales couleur d'hermine
Semblent de grands papillons blancs
Je suis le symbole suprême
Le grand conseiller des amours
Et l'on m'admire quand on aime
En effeuillant mes beaux atours
(Texte supprimé
Quand on me voit, fraîche et si belle
On envie mon sort bienheureux
Qui chante sous l'azur des cieux
L'amante est ma fidèle amie
Elle me confie ses secrets
Quand la nature est endormie
Et que dorment les indiscrets
Elle me parle franchement
Et moi je lui réponds de même
Mon pétale dit doucement
Ce que dirait l'amant « je t'aime »)
J'explique aux amants le problème
Qui se cache aux yeux des jaloux
Quand mon pétale dit je t'aime
Les coeurs méchants se font plus doux
(Texte supprimé
Le degré de l'amour on l'ignore
Moi pâquerette, je devine
A mon amie parlant encore
Je dis caressante et divine)
Parfois de trompeuses chimères
Tout bas soupirent un aveu
Les douleurs semblent moins amères
Quand mon pétale dit « un peu »
Il est des jours dans l'existence
Où le bonheur vient tout à coup
Apportant avec l'espérance
Le doux murmure du « beaucoup »
(Texte supprimé
Puis dans un coeur fou comme toi
Tu trouveras l'amour charnel
Et ton âme tremblante d'émoi
Viendra au pied de mon autel)
Dans les heures qui passent brèves
Au sein de mon isolement
Sous la caresse des beaux rêves
On aime « Passionnément »
(Texte supprimé
Mais dans le ciel de gros nuages
Viendront pour assombrir ton rêve
Car c'est souvent dans les orages
Que le plus bel amour s'achève)
Mais dans le ciel de gros nuages
Jettent parfois l'obscurité
Sur le grand livre aux belles pages
L'oubli souvent s'est arrêté
(Texte supprimé
Ton coeur battant à se briser
Me maudira un peu partout
On m'aime, il faut me mépriser
Quand on effeuille un « Pas du tout »)
Alors tristement on me cueille
On me méprise un peu partout
C'est la colère qui m'accueille
Quand on arrache un « Pas du tout »
Je suis le symbole suprême
Le grand conseiller des amours
Et l'on m'admire quand on aime
En effeuillant mes blancs atours
Honoré HARMAND