La pâquerette
4 juillet 1936
En me promenant dans mon parc en fleurs
Hier, je cueillis une pâquerette
Et je dis tout bas : ô ! Belle fleurette
Dis-moi le secret qu'il cache en son coeur.
M'aime-t-il vraiment ? Ses yeux bleus le disent ;
Sa lèvre m'en fit le suprême aveu.
La fleur répondit : Femme il t'aime « un peu ».
Je ne savais pas que les fleurs méprisent.
J'en cueillis une autre et mes doigts jaloux
N'osaient effeuiller le dernier pétale
La fleur répondit : ta beauté fatale
Veut que, désormais, il t'aime « beaucoup ».
Sceptique, ô ! Combien, croyante à mes heures
J'en cueillis une autre et l'interrogeant :
M'aime-t-il ? La fleur dit : « éperdument »
Et son coeur se ferme aux frissons des leurres.
Heureuse, en chantant, je rentrai chez nous
N'osant cueillir une autre fleurette
De peur que sa voix, cruelle, indiscrète
Dise que son coeur n'aime « pas du tout ».
Honoré HARMAND