Chrysanthèmes
8 novembre 1906
À Jeanne CHAPELLE
O fleur pâle ornement des images d'Automne
Sans parfum qui nous grise aussi sans voluptés
Quand je te vois fleurir la gaieté m'abandonne
Et tu souris toujours sous les cieux attristés
Tu pousses quand tout meurt dans la Nature entière
Quand d'un feuillage d'or les arbres sont parés
Tu fleuris quand la rose à son heure dernière
Effeuille tristement ses pétales fanés
Tu souris à l'hiver malgré que la lumière
D'un soleil radieux méprise tes atours
Tu te ris du soleil et moqueuse et légère
Tu balances ta tête, aux reflets de velours
Dans les jardins en deuil ta frileuse parure
Jette une note gaie et sur les tapis d'or
Par l'Automne étendus tes rameaux de verdure
Font croire que l'Hiver est loin de nous encor
Sur les tombeaux glacés tu remplaces les roses
Quand chaque fleur se fane au baiser des brouillards
Tu figures partout et dans les chambres roses
Et dans les grands salons et sur les corbillards.
N'es-tu pas par ta grâce et par ta modestie
La fleur qui plaît aux yeux entre toutes les fleurs
Puisqu'au sein de la Mort tu fais briller la Vie
Comme un rayon d'espoir brille au sein des douleurs.
Honoré HARMAND