Quelle religion cherche aujourd'hui les astres ?
Le catholicisme âpre et transformant en piastres
Des morceaux de liards et de maravédis,
L'ENFER
N'est plus qu'.un négrier marchand de paradis,.
Qui vend le ciel et qui des âmes fait la traite.
Du globe émancipé capitale en retraite,
Rome est caduque, . et n'a, son. âge l'accablant,
Qu'un aigle aveugle et triste et de 'vieillesse blanc,
Plus de mémoire, plus de rayons, plus de gloire,
Plus de dents, quoiqu'elle ait encore une mâchoire.
Elle laisse crouler ses héros et ses dieux, .
Ne se rappelle plus son passé radieux,
Et n'en sait, l'idiote et pauvre douairière,. .
Que ce qu'il faut pour faire en latin sa. prière,
Et dans le Capitole où César triomphait,
Mange la pension que le monde lui fait.
L'Hadès où les titans râlent sous des décombres,
Le Ténare, eau qui brûle et dont le flot rongeur
Jette aux porches de .l'ombre, une fauve rougeur,
Le Phlégéton;. l'Averne au funèbrè cratère;
Sont les trous monstrueux qu'à travers cette terre
L'homme fait en tremblant du côté de la nuit,
Et la .forme, qu'au. fond du gouffre où rien- ne luit,
Sa superstition, - sa. crainte - ou sa. démence .-
Donne .aux noirs soupiraux, du châtiment immense.
L'antique enfer payen tombe et croule aujourd'hui ;
Il est. vide ; on, ne sait dans quel néant ont fui
Ses mânes au long voile et ses .mégères nues ;
DERNIÈRE GERBE
On n'en répare plus les blêmes' avenues,
Et le prêtre en dédaigne aujourd'hui l'entretien ;
La terre maintenant croit à l'enfer chrétien ;
La foi des hommes s'est par degrés retirée
Du Tartare où s'éteint l'épouvante sacrée ;
Leur peur quitte Pluton et passe à Lucifer ;
Leur mobilité va jusqu'à changer d'enfer ;
L'abandon épaissit sa ronce parasite
Dans tous ces gouffres morts, Styx, Achéron, Cocyte ;
L'homme n'y sent plus rien d'hostile et de puni ;
Un reste de fumée au fond de l'infini
Noircit à peine encor, ces vieilles cheminées.