II
Tu lèves sans douleur, sans joie
Tes yeux où le soleil se perd,
Tes mains où notre amour se noie
Comme un bon frisson dans la mer.
Oh! pendant que, morne débâcle,
Nous passons dans un morne bruit,
Si tu faisais le doux miracle
D'avoir un peu froid dans la nuit. . .
Si trop calme et belle sans trêve
Aux beaux silences étoilés,
Tes yeux s'appauvrissaient du rêve
Dont nos regards sont désolés. . .
On viendrait te voir, simple et chère,
Indécise comme un secret,
Avec la robe de prière
Qu'un humble cierge te ferait.
Tu serais ce qui fait renaître
L'âme heureuse, le songe éteint. . .
Et ton chemin serait peut-être
La caresse de mon destin.
Tu serais l'amour, et l'enfance. . .
Et pourtant, toi qui ne dis rien,
Et moi qui souris de souffrance,
Je sens que ton silence est bien.
Je t'adore dans ton grand règne,
Et dans l'espace sans amours.
Tu ne dis rien comme l'on saigne,
Et te voir, c'est pleurer toujours.
Oh! sans raison, sans mal, sans crimes,
Et sans remords au fond de moi,
Je voudrais à tes pieds sublimes
Pleurer que la lumière soit!
Pleurer que le jour s'irradie
Que la nuit brûle dans les cieux,
Pleurer tout ce pauvre incendie
Qui monte humblement dans nos yeux. . .