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 François Fénelon. (1651-1715) DIALOGUE 63

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MessageSujet: François Fénelon. (1651-1715) DIALOGUE 63   François Fénelon. (1651-1715) DIALOGUE 63 Icon_minitimeMar 29 Jan - 10:05

DIALOGUE 63
Charles-Quint Et Un Jeune Moine
De Saint-Just.
On cherche souvent la solitude par inquiétude ; et
ceux qui sont accoutumés au fracas du monde ne
sauroient s' accoutumer à la retraite.

Charles Quint.
Allons, mon frère, il est temps de se lever ;
vous dormez trop pour un jeune novice qui
doit être fervent.
Le Moine.
Quand voulez-vous que je dorme, sinon
pendant que je suis jeune ? Le sommeil n' est
point incompatible avec la ferveur.

Charles Quint.
Quand on aime l' office, on est bientôt éveillé.
Le Moine.
Oui, quand on est à l' âge de votre majesté ;
mais au mien on dort tout debout.

Charles Quint.
Hé bien ! Mon frère, c' est aux gens de mon
âge à éveiller la jeunesse trop endormie.
Le Moine.
Est-ce que vous n' avez plus rien de meilleur
à faire ? Après avoir si long-temps troublé le
repos du monde entier, ne sauriez-vous me
laisser le mien ?

Charles Quint.
Je trouve qu' en se levant ici de bon matin,
on est encore bien en repos dans cette profonde
solitude.
Le Moine.
Je vous entends, sacrée majesté : quand vous
vous êtes levé ici de bon matin, vous y
trouvez la journée bien longue : vous êtes
accoutumé à un plus grand mouvement. Avouez-le
sans façon : vous vous ennuyez de n' avoir ici
qu' à prier Dieu, qu' à monter vos horloges, et
qu' à éveiller de pauvres novices qui ne sont
pas coupables de votre ennui.

Charles Quint.
J' ai ici douze domestiques que je me suis
réservés.
Le Moine.
C' est une triste conversation pour un homme
qui étoit en commerce avec toutes les nations
connues.

Charles Quint.
J' ai un petit cheval pour me promener dans
ce beau vallon orné d' orangers, de myrtes, de
grenadiers, de lauriers et de mille fleurs, au
pied de ces belles montagnes de l' Estramadure,
couvertes de troupeaux innombrables.
Le Moine.
Tout cela est beau ; mais tout cela ne parle
point. Vous voudriez un peu de bruit et de
fracas.

Charles Quint.
J' ai cent mille écus de pension.
Le Moine.
Assez mal payés. Le roi votre fils n' en a
guère de soin.

Charles Quint.
Il est vrai qu' on oublie bientôt les gens qui
se sont dépouillés et dégradés.
Le Moine.
Ne comptiez-vous pas là-dessus quand vous
avez quitté vos couronnes ?

Charles Quint.
Je vois bien que cela devoit être ainsi.
Le Moine.
Si vous avez compté là-dessus, pourquoi
vous étonnez-vous de le voir arriver ?
Tenez-vous-en à votre premier projet : renoncez à
tout ; oubliez tout ; ne desirez plus rien ;
reposez-vous, et laissez reposer les autres.

Charles Quint.
Mais je vois que mon fils, après la bataille
de Saint-Quentin, n' a pas su profiter de la
victoire ; il devroit être déja à Paris. Le Comte
D' Egmont lui a gagné une autre bataille à
Gravelines ; et il laisse tout perdre. Voilà
Calais repris par le Duc De Guise sur les
anglois. Voilà ce même duc qui a pris Thionville
pour couvrir Metz. Mon fils gouverne mal : il ne
suit aucun de mes conseils ; il ne me paie point ma
pension ; il méprise ma conduite et les plus fidèles
serviteurs dont je me suis servi. Tout cela me
chagrine et m' inquiète.
Le Moine.
Quoi ! N' étiez-vous venu chercher le repos dans cette
retraite qu' à condition que le roi votre fils feroit
des conquêtes, croiroit tous vos conseils, et
achèveroit d' exécuter tous vos projets ?

Charles Quint.
Non, mais je croyois qu' il feroit mieux.
Le Moine.
Puisque vous avez tout quitté pour être en
repos, demeurez-y, quoi qu' il arrive ; laissez
faire le roi votre fils comme il voudra. Ne
faites point dépendre votre tranquillité des
guerres qui agitent le monde : vous n' en êtes
sorti que pour n' en plus entendre parler. Mais
dites la vérité, vous ne connoissiez guère la
solitude quand vous l' avez cherchée. C' est par
inquiétude que vous avez desiré le repos.

Charles Quint.
Hélas ! Mon pauvre enfant, tu ne dis que
trop vrai ; et Dieu veuille que tu ne te sois pas
mécompté comme moi en quittant le monde
dans ce noviciat !

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