À mon frère Edmond
Frère, quand les soucis et les peines sans nombre
Déroulent à mes yeux l'avenir triste et sombre,
Je me prends à songer à ce jour plein de deuil
Où, la première fois, nous vîmes un cercueil:
Nous étions orphelins; nous n'avions plus de mère...
Il fallut, nous aussi, boire à la coupe amère
Où chacun ici-bas s'abreuve tôt ou tard.
Sa dernière parole et son dernier regard
Furent pour nous: « Enfants! chers enfants, nous dit-elle,
Approchez! voulez-vous que ma voix maternelle
Vous enseigne en mourant le secret d'être heureux:
Soyez toujours unis et marchez deux à deux! »
Nous lui promîmes tout: tu t'en souviens! Écoute!
Bien des malheurs depuis ont marqué notre route;
Eh bien! soyons unis! et, la main dans la main,
Aidons-nous, et trompons les ennuis du chemin!