Devant une gravure
Devant une gravure représentant une Vénitienne
et ses amoureux ou une Promenade en gondole.
- L'heure est fraîche comme les roses
De ta joue, ô belle Ninon;
Puis vois quels tristes virtuoses
Viennent chanter sous ton balcon.
Vite, chiffonne cette gaze
Sur ton front!
- Vite, envolons-nous!
- As-tu ta gondole Pégase,
Comte Apollon?
- Oui, venez tous...
Est-ce pas charmant? la lagune
Semble au loin d'or, ici lilas...
- Deux barques qui passent!...
- Dans l'une
On rit...
- Dans l'autre on parle bas.
- Ah! je me sens l'âme ravie
Par l'heure mourante des jours.
La douce chose que la vie!
- Sans amours, Nina? sans amours?
- Oui, sans amours... L'amitié calme
Est douce, l'amour fait pitié.
Si j'avais à donner la palme,
J'en ferais don à l'amitié...
L'amour est un rêve et les hommes
N'ont que d'égoïstes désirs.
- Bon! s'écrie Apollon, nous sommes
Arrivés au Pont des Soupirs!
Certes, pour ta philosophie,
Elle n'est pas bonne, Ninon.
Qui ne veut aimer?
- Qui n'envie
D'être aimé? - Moi! -
- Tu railles.
- Non.
- Tu railles, l'on verra dans Pise
La tour se redresser avant
Qu'on voie une enfant de Venise
Sans amoureux et sans suivant.
- Je n'ai jamais aimé, vous dis je,
Ni n'aimerai.
- Jamais?
- Jamais.
J'entends d'amour. Suis-je un prodige?
Ou bien un monstre? je ne sais.
- Tu braves l'amour, dit Horace,
Quel armure as-tu sur le coeur?
- Cette dentelle... ma cuirasse
A-t-elle des défauts, seigneur?...
Or, ils étaient dans la gondole
Un duc, un comte, un chevalier,
Outre, tenant une viole,
Un enfant, simple bachelier,
Ou mieux un adolescent pâle
Ayant du penchant pour les vers
.....................
Cette pièce est restée inachevée. Mon père, très probablement,
l'avait oubliée dans ses cartons.