PLUME DE POÉSIES
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 Théophile Gautier. (1811-1872) La Chaîne D’Or. Ou L’Amant Partagé.

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Rappel du premier message :

La Chaîne D’Or.
Ou L’Amant Partagé.

Plangon la Milésienne fut en son temps une des
femmes les plus à la mode d’Athènes. Il n’était bruit
que d’elle dans la ville ; pontifes, archontes, généraux,
satrapes, petits-maîtres, jeunes patriciens, fils de
famille, tout le monde en raffolait. Sa beauté, semblable
à celle d’Hélène aimée de Pâris, excitait l’admiration et
les désirs des vieillards moroses et regretteurs du temps
passé. En effet, rien n’était plus beau que Plangon, et je
ne sais pourquoi Vénus, qui fut jalouse de Psyché, ne
l’a pas été de notre Milésienne. Peut-être les
nombreuses couronnes de roses et de tilleul, les
sacrifices de colombes et de moineaux, les libations de
vin de Crète offerts par Plangon à la coquette déesse,
ont-ils détourné son courroux et suspendu sa
vengeance ; toujours est-il que personne n’eut de plus
heureuses amours que Plangon la Milésienne,
surnommée Pasiphile.
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qui était assis au pied du mât, tenant sous son bras une
petite cassette où il y avait trois bourses d’or et deux
poignards affilés tout de neuf, sa seule ressource et son
dernier recours s’il ne réussissait pas dans sa tentative
désespérée.
Voici ce que l’enfant voulait faire : il voulait aller se
jeter aux pieds de Bacchide, baigner de larmes ses
belles mains, et la supplier, par tous les dieux du ciel et
de l’enfer, par l’amour qu’elle avait pour lui, par pitié
pour sa vieille mère que sa mort pousserait au tombeau,
par tout ce que l’éloquence de la passion pourrait
évoquer de touchant et de persuasif, de lui donner la
chaîne d’or que Plangon demandait comme une
condition fatale de sa réconciliation avec lui.
Vous voyez bien que Ctésias de Colophon avait
complètement perdu la tête. Cependant toute sa destinée
pendait au fil fragile de cet espoir ; cette tentative
manquée, il ne lui restait plus qu’à ouvrir, avec le plus
aigu de ses deux poignards, une bouche vermeille sur sa
blanche poitrine pour le froid baiser de la Parque.
Pendant que l’enfant colophonien pensait à toutes
ces choses, le navire filait toujours, de plus en plus
rapide, et les derniers reflets du soleil couchant jouaient
encore sur l’airain poli des boucliers suspendus à la
poupe, lorsque le pilote cria : « Terre ! terre ! »
L’on était arrivé à Samos.
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Dès que l’aurore blonde eut soulevé du doigt les
rideaux de son lit couleur de safran, l’enfant se dirigea
vers la demeure de Bacchide le plus lentement
possible ; car, singularité piquante, il avait maudit la
nuit trop lente et aurait été pousser lui-même les roues
de son char sur la courbe du ciel, et maintenant il avait
peur d’arriver, prenait le chemin le plus long et
marchait à petits pas. C’est qu’il hésitait à perdre son
dernier espoir et reculait au moment de trancher lui-
même le noeud de sa destinée ; il savait qu’il n’avait
plus que ce coup de dé à jouer ; il tenait le cornet à la
main, et n’osait pas lancer sur la table le cube fatal.
Il arriva cependant, et, en touchant le seuil, il promit
vingt génisses blanches aux cornes dorées à Mercure,
dieu de l’éloquence, et cent couples de tourterelles à
Vénus, qui change les coeurs.
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Une ancienne esclave de Bacchide le reconnut.
« Quoi ! c’est vous, Ctésias ? Pourquoi la pâleur des
morts habite-t-elle sur votre visage ? Vos cheveux
s’éparpillent en désordre ; vos épaules ne sont plus
frottées d’essence ; le pli de votre manteau pend au
hasard ; vos bras ni vos jambes ne sont plus épilés.
Vous êtes négligé dans votre toilette comme le fils d’un
paysan ou comme un poète lyrique. Dans quelle misère
êtes-vous tombé ? Quel malheur vous est-il arrivé ?
Vous étiez autrefois le modèle des élégants. Que les

dieux me pardonnent ! votre tunique est déchirée à deux
endroits.
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-Ériphile, je ne suis pas misérable, je suis
malheureux. Prends cette bourse, et fais-moi parler sur-
le-champ à ta maîtresse. »
La vieille esclave, qui avait été nourrice de
Bacchide, et à cause de cela jouissait de la faveur de
pénétrer librement dans sa chambre à toute heure du
jour, alla trouver sa maîtresse, et pria Ctésias de
l’attendre à la même place.
« Eh bien, Ériphile ? dit Bacchide en la voyant
entrer avec une mine compassée et ridée, pleine
d’importance et de servilité à la fois.
-Quelqu’un qui vous a beaucoup aimée demande à
vous voir, et il est si impatient de jouir de l’éclat de vos
yeux, qu’il m’a donné cette bourse pour hâter les
négociations.
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MessageSujet: Re: Théophile Gautier. (1811-1872) La Chaîne D’Or. Ou L’Amant Partagé.    Théophile Gautier. (1811-1872) La Chaîne D’Or.  Ou L’Amant Partagé.  - Page 5 Icon_minitimeSam 27 Juil - 22:59

-Quelqu’un qui m’a beaucoup aimée ? fit Bacchide
un peu émue. Bah ! ils disent tous cela. Il n’y a que
Ctésias de Colophon qui m’ait véritablement aimée.
-Aussi est-ce le seigneur Ctésias de Colophon en
personne.
-Ctésias dis-tu ? Ctésias, mon bien-aimé Ctésias ! Il
est là qui demande à me voir ? Va, cours aussi vite que
tes jambes chancelantes pourront te le permettre, et

amène-le sans plus tarder. »
Ériphile sortit avec plus de rapidité que l’on n’eût pu
en attendre de son grand âge.
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MessageSujet: Re: Théophile Gautier. (1811-1872) La Chaîne D’Or. Ou L’Amant Partagé.    Théophile Gautier. (1811-1872) La Chaîne D’Or.  Ou L’Amant Partagé.  - Page 5 Icon_minitimeSam 27 Juil - 23:00

Bacchide de Samos est une beauté d’un genre tout
différent de celui de Plangon ; elle est grande, svelte,
bien faite ; elle a les yeux et les cheveux noirs, la
bouche épanouie, le sourire étincelant, le regard humide
et lustré, le son de voix charmant, les bras ronds et
forts, terminés par des mains d’une délicatesse parfaite.
Sa peau est d’un brun plein de feu et de vigueur, dorée
de reflets blonds comme le cou de Cérès après la
moisson ; sa gorge, fière et pure, soulève deux beaux
plis à sa tunique de byssus5.
Plangon et Bacchide sont sans contredit les deux
plus ravissantes hétaïres de toute la Grèce, et il faut
convenir que Ctésias, lui qui a été amant de Bacchide et
de Plangon, fut un mortel bien favorisé des dieux.
Ériphile revint avec Ctésias.
L’enfant s’avança jusqu’au petit lit de repos où
Bacchide était assise, les pieds sur un escabeau d’ivoire.
À la vue de ses anciennes amours, Ctésias sentit en lui-
même un mouvement étrange ; un flot d’émotions
violentes tourbillonna dans son coeur, et, faible comme
5 Tissu de lin très fin.
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MessageSujet: Re: Théophile Gautier. (1811-1872) La Chaîne D’Or. Ou L’Amant Partagé.    Théophile Gautier. (1811-1872) La Chaîne D’Or.  Ou L’Amant Partagé.  - Page 5 Icon_minitimeSam 27 Juil - 23:00

il était, épuisé par les pleurs, les insomnies, le regret du
passé et l’inquiétude de l’avenir, il ne put résister à
cette épreuve, et tomba affaissé sur ses genoux, la tête
renversée en arrière, les cheveux pendants, les yeux
fermés, les bras dénoués comme si son esprit eût été
visiter la demeure des mânes.
Bacchide effrayée souleva l’enfant dans ses bras
avec l’aide de sa nourrice, et le posa sur son lit.
Quand Ctésias rouvrit les yeux, il sentit à son front
la chaleur humide des lèvres de Bacchide, qui se
penchait sur lui avec l’expression d’une tendresse
inquiète.
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MessageSujet: Re: Théophile Gautier. (1811-1872) La Chaîne D’Or. Ou L’Amant Partagé.    Théophile Gautier. (1811-1872) La Chaîne D’Or.  Ou L’Amant Partagé.  - Page 5 Icon_minitimeSam 27 Juil - 23:00

« Comment te trouves-tu, ma chère âme ? dit
Bacchide, qui avait attribué l’évanouissement de
Ctésias à la seule émotion de la revoir.
-Ô Bacchide ! il faut que je meure, dit l’enfant
d’une voix faible, en enlaçant le col de l’hétaïre avec
ses bras amaigris.
-Mourir ! enfant, et pourquoi donc ? N’es-tu pas
beau, n’es-tu pas jeune, n’es-tu pas aimé ? Quelle
femme, hélas ! ne t’aimerait pas ? À quel propos parler
de mourir ? C’est un mot qui ne va pas dans une aussi
belle bouche. Quelle espérance t’a menti ? quel malheur
t’est-il donc arrivé ? Ta mère est-elle morte ? Cérès a-t-
elle détourné ses yeux d’or de tes moissons ? Bacchus

a-t-il foulé d’un pied dédaigneux les grappes non
encore mûres de tes coteaux ? Cela est impossible ; la
Fortune, qui est une femme, ne peut avoir de rigueurs
pour toi.
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-Bacchide, toi seule peux me sauver, toi, la
meilleure et la plus généreuse des femmes ; mais non,
je n’oserai jamais te le dire ; c’est quelque chose de si
insensé, que tu me prendrais pour un fou échappé
d’Anticyre.
-Parle, enfant ; toi que j’ai tant aimé, que j’aime
tant encore, bien que tu m’aies trahie pour une autre
(que Vénus vengeresse l’accable de son courroux !),
que pourrais-tu donc me demander qui ne te soit
accordé sur-le-champ, quand ce serait ma vie ?
-Bacchide, il me faut ta chaîne d’or, dit Ctésias
d’une voix à peine intelligible.
-Tu veux ma chaîne, enfant, et pour quoi faire ?
Est-ce pour cela que tu veux mourir ? et que signifie ce
sacrifice ? répondit Bacchide surprise.
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-Écoute, ô ma belle Bacchide ! et sois bonne pour
moi comme tu l’as toujours été. J’aime Plangon la
Milésienne, je l’aime jusqu’à la frénésie, Bacchide. Un
de ses regards vaut plus à mes yeux que l’or des rois,
plus que le trône des dieux, plus que la vie ; sans elle je
meurs ; il me la faut, elle est nécessaire à mon existence
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comme le sang de mes veines, comme la moelle de mes
os ; je ne puis respirer d’autre air que celui qui a passé
sur ses lèvres. Pour moi tout est obscur où elle n’est
pas ; je n’ai d’autre soleil que ses yeux. Quelque
magicienne de Thessalie m’a sans doute ensorcelé.
Hélas ! que dis-je ? le seul charme magique, c’est sa
beauté, qui n’a d’égale au monde que la tienne. Je la
possédais, je la voyais tous les jours, je m’enivrais de sa
présence adorée comme d’un nectar céleste ; elle
m’aimait comme tu m’as aimé, Bacchide ; mais ce
bonheur était trop grand pour durer. Les dieux furent
jaloux de moi. Plangon m’a chassé de chez elle ; j’y
suis revenu à plat ventre comme un chien, et elle m’a
encore chassé. Plangon, la flamme de ma vie, mon âme,
mon bien, Plangon me hait, Plangon m’exècre ; elle
ferait passer les chevaux de son char sur mon corps
couché en travers de sa porte. Ah ! je suis bien
malheureux. »
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