Chapitre X. De bien prononcer les vers.
Ce lieu ne me semble mal à propos dire un mot de la prononciation, que les Grecs
appellent hypokrisis; afin que s'il t'advient de réciter quelquefois tes vers,
tu les prononces d'un son distinct, non confus, viril, non efféminé, avec une
voix accommodée à toutes les affections que tu voudras exprimer en tes vers. Et
certes comme icelle prononciation, et geste approprié à la matière que l'on
traite, voire le jugement de Démosthène, est le principal de l'orateur; aussi
n'est-ce peu de chose que de prononcer ses vers de bonne grâce. Vu que la poésie
(comme dit Cicéron) a été inventée par observation de prudence et mesure des
oreilles, dont le jugement est très superbe, comme de celles qui répudient
toutes choses âpres et rudes, non seulement en composition et structure de mots,
mais aussi en modulation de voix. Nous lisons cette grâce de prononcer avoir été
fort excellente en Virgile, et telle qu'un poète de son temps disait, que les
vers de lui, par lui prononcés, étaient sonoreux et graves ; par autres,
flasques et efféminés.